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Le paracétamol sauvé par le Covid-19 ?

La baisse maintes fois reportée du prix du paracétamol a finalement été annulée.

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C'est une décision qui va soulager les pharmaciens, mais également les industriels. Le 17 janvier 2020, la publication au Journal officiel d'une baisse de prix de 47 spécialités remboursables à base de paracétamol seul programmée pour le 1er avril avait fait grincer des dents les syndicats de pharmaciens d'officine puisque la FSPF avait calculé que cette mesure aurait fait perdre 4,5 millions d'euros à tout le réseau. D'abord reportée au 1er juin, puis au 1er juillet, cette baisse n'aura finalement pas lieu ainsi que vient de le notifier le Comité économique des produits de santé (CEPS) aux représentants de la profession.

Fragilisation de la production nationale

Si nul ne connaît exactement les motivations de cette volte-face, l'intense lobbying réalisé par plusieurs laboratoires, dont Upsa, pour faire reculer le CEPS pourrait bien avoir porté ses fruits. Dès l'annonce de cette mesure en fin d'année 2019, des tensions avaient été observées sur les sites agenais d'Upsa (Efferalgan, Dafalgan) où le laboratoire fabrique 100 % de ses spécialités à base de paracétamol. La crise du Covid-19 étant depuis passée par là, la fermeture de plusieurs sites de production de principes actifs en Asie avait laissé craindre une pénurie de médicaments à base de paracétamol, largement indiqué dans la prise en charge des formes mineures à modérées des infections à SARS-CoV-2, mais également une augmentation des prix des principes actifs en 2021. François Duplaix, président directeur général d'Upsa avait ainsi déclaré fin mai, dans un entretien accordé à la rédaction de France 3, qu'une baisse des prix du paracétamol entraînerait mécaniquement une « fragilisation du site d'Agen » et de sa « capacité de production stratégique » avec, à terme, « une forte tentation de délocalisation progressive de l’outil industriel ».

L'effet souveraineté

Des arguments repris par trois députés et deux sénateurs du Lot-et-Garonne qui ont adressé, le 12 mai, une demande de rendez-vous au ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, en alléguant que « la baisse de prix du paracétamol fragilise économiquement Upsa et peut être considérée comme une incitation à la délocalisation à moyen-long terme ». Les affirmations du président de la République quant à la nécessité de réimplanter en France et en Europe des capacités de production stratégiques et de retrouver une souveraineté industrielle ne leur a également pas échappé lorsqu'ils rappellent que « dans un souci de cohérence avec la forte détermination politique du gouvernement de maintenir les sites de production en France », il serait souhaitable que « la décision de baisse de prix soit réexaminée, avec a minima un report jusqu’à la fin de l’année et, au mieux, son annulation ». Rappelons enfin que Sanofi, fabricant du Doliprane, a annoncé dernièrement vouloir rapatrier en Europe ses filiales fabriquant des principes actifs tout en fustigeant les incessantes baisses de prix ayant poussé les laboratoires pharmaceutiques à la délocalisation.

Par Benoît Thelliez

5 Juin 2020

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