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La clause de conscience suscite la méfiance

À peine mis en ligne, l'article instaurant une clause de conscience dans le projet de code de déontologie a suscité de nombreuses et vives réactions. Entre contradictions et besoin de clarification.

La polémique n'a cessé d'enfler depuis une semaine. Le nouveau vote proposé par l'Ordre des pharmaciens sur son article R. 4235-18, qui instaurerait une clause de conscience dans le code de déontologie de la profession, a d'abord fait des vagues sur les réseaux sociaux, où un collectif de pharmaciens twittos a lancé le hashtag #MaContraceptionMonDroit puis une pétition sur le site Change.org pour que l'Ordre « retire immédiatement cette clause du projet de code de déontologie ». Selon eux, « dans le code de déontologie en vigueur, les pharmaciens peuvent déjà refuser de délivrer un traitement dans l'intérêt de la santé du patient. Alors pourquoi inscrire cette clause de conscience dans le nouveau code si ce n'est pour satisfaire les pharmaciens les plus réactionnaires ? » Et de citer « ceux qui refusent déjà de délivrer la pilule, le stérilet ou encore la contraception d'urgence ». Ils ajoutent que « le devoir des pharmaciens, c'est d'aider les patients et non d'entraver leurs droits ou leur compliquer l'accès à un traitement », récoltant en vingt-quatre heures plus de 7 300 signatures (à la date du 20 juillet à 16 h 30).

Clarification

Une crainte semble-t-il partagée par la ministre des Droits des femmes. Dans un communiqué diffusé mardi 19 juillet, Laurence Rossignol dit avoir « découvert avec étonnement » la consultation lancée par l'Ordre et qui « ouvrirait clairement la possibilité pour des pharmaciens de refuser de délivrer la contraception d'urgence » par exemple. « Quel que soit le résultat de cette consultation, le simple fait d'interroger les pharmaciens sur ce sujet nous rappelle que l'accès à la contraception et à l'interruption volontaire de grossesse (IVG), en tant que droits à part entière, n'est jamais définitivement acquis », ajoute-t-elle, appelant l'Ordre à « clarifier l'objet de cette consultation ».

Contradictions

La sémantique pourrait en effet constituer une partie du problème. L'article R. 4235-18 évoque la possibilité de « refuser d'effectuer un acte pharmaceutique susceptible d'attenter à la vie humaine ». Isabelle Adenot assure d'ailleurs, dans un communiqué rédigé en réponse à Laurence Rossignol, que « les débats qui se sont déroulés au sein de l'Ordre sur cet article n'ont jamais porté sur la contraception mais sur la fin de vie, situation souvent très délicate à gérer par les pharmaciens de ville et d'hôpital ». Pour la présidente de l'Ordre, « il n'est évidemment pas question dans cette proposition de texte de pilule du lendemain ou de stérilet ». Sauf que la terminologie est vague et que le sujet de la contraception dans ce cadre était inévitable. D'autant que la chef du pôle Réserve sanitaire de l'Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Éprus), Clara De Bort, a publié sur son compte Twitter une archive presse dans laquelle Isabelle Adenot déclarait regretter que les pharmaciens ne bénéficient pas d'une clause de conscience pour l'IVG médicamenteuse... 
Le vote reste en tout cas ouvert jusqu'au 31 août, en attendant que le Conseil national de l'Ordre statue le 5 septembre. 

Par Anne-Laure Mercier

20 Juillet 2016

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